Vaincus en décembre 2013 par des éléments des Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) conduits par le colonel Mamadou Ndala (qui sera lâchement tué quelques mois après), les rebelles du M23 ont repris les armes depuis près de six mois. Soutenus par le pouvoir de Kigali (Rwanda), voire de Kampala (Ouganda), les rebelles du M23 occupent la Cité de Bunagana- à la frontière avec l’Ouganda – depuis quatre mois.
Il y a quelques semaines, ils se sont emparés de Rutshuru-centre et de Kiwanja. Conscients du danger qui guette la ville de Goma (chef-lieu de la province du Nord-Kivu) qui semble être le principal objectif des insurgés pour obtenir le dialogue avec le gouvernement de Kinshasa, Félix-Antoine Tshisekedi, le commandant suprême des FARDC a non seulement décrété une mobilisation générale, mais aussi secoué l’Exécutif national pour doter les FARDC des moyens adéquats pour mettre fin à l’aventure des rebelles du M23. C’est qui a été fait avec l’acquisition des avions de chasse (de marque Sukhoi 25) et des hélicoptères.
Alors qu’elle se déroule dans les montagnes du Kivu, la guerre entre les FARDC et le M23 semble être suivie en direct. Et cela, par la magie des réseaux sociaux. C’est presque chaque jour que les militaires qui sont au front se font filmer et publient des vidéos. Leur moindre avancée sur terrain est connue de tous. Toutes leurs nouvelles acquisitions en matériels de guerre sont exhibées.
Pire, ils publient même des vidéos des militaires blessés au front. La plus célèbre est celle de ce colonel, blessé au genou, s’appuyant sur deux de ses collègues, qui pleurait des douleurs.
Les marques d’avions de chasse acquis par les forces aériennes de la RDC sont connues non seulement par tous les Congolais, mais aussi et surtout par l’ennemi. Même quand un avion chinois atterrit à l’aéroport de Goma pour débarquer des matériels de guerre, les téléphones sont mis à contribution pour dire au monde entier « voici ce que la RDC a acheté pour faire sa guerre contre les groupes rebelles qui écument dans l’Est ».
Est-ce que les militaires congolais qui postent des vidéos savent qu’ils permettent à l’ennemi de localiser leur position au front ? Est-ce que les militaires congolais qui postent des images de leurs collègues blessés savent qu’ils sèment la peur dans les têtes de ceux qui n’ont pas rejoint le front ? Est-ce que les militaires congolais qui postent leurs photos savent qu’ils donnent l’occasion à l’ennemi d’identifier le type d’armes qu’ils portent ?
Question : qui autorise ou qui laisse les éléments des Forces Armées de la République Démocratique du Congo qui sont au front pour se faire filmer et poster des vidéos ? Et mon fils de me poser une autre question : comment ces militaires, censés être concentrés pour surveiller tous les mouvements de l’ennemi, trouvent-ils le temps de charger leurs téléphones ?
Militaire ayant fait la guerre de 40-45, mon père, Emmanuel Kabamba, me rappelait que pendant la guerre on ne filme pas tout, on ne montre pas tout, on ne dit pas tout. Si le lieutenant-général Christian Tshiwewe, le chef d’Etat-major des FARDC, peut rappeler ce principe aux troupes engagées au front, l’ennemi pourra être dérouté.
Rombaut KASONGO MABIA (RKM)
Enseignant de journalisme (Ifasic) et analyste politique