Le gouvernement congolais, par le truchement du ministre du Travail, a pris un arrêté visant à doubler le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG), le faisant passer de 7.000 à 14.000 FC. Cette décision, annoncée le 2 janvier 2025, est jugée en totale contradiction avec les dispositions constitutionnelles par le Dr Jean-Michel KUMBU Ki NGIMBI, professeur émérite et expert en gouvernance.
Dans une tribune publiée le dimanche 5 janvier 2025, Jean-Michel Kumbu souligne que la fixation du SMIG relève des compétences exclusives des provinces. Il met en garde contre un goulot d’étranglement inévitable entre la détermination d’un taux et son application sur le terrain.
“J’ai suivi sur Top Congo que le taux du SMIG a été revu du simple au double, de 7.000 à 14.000 FC (02.01.2025). C’est un décret du Premier Ministre (Décret n° 18/017 du 22 mai 2018) qui a fixé le SMIG à 7.000 après concertation de toutes les parties prenantes. La question reste discutable car le SMIG relève des compétences exclusives des provinces (art. 204 point 17). Mais tel n’est pas le point de débat de ce jour.Comment est-ce possible, en droit, que ce soit un arrêté ministériel qui le modifie ? Où est passé le principe de parallélisme de forme et de compétence ? C’est tellement basique que je suis juridiquement étourdi”, a écrit ce chercheur.
Cet expert insiste sur le lien direct entre le SMIG et le pouvoir d’achat, affirmant que la Constitution a judicieusement attribué cette compétence aux provinces.
« Cela signifie qu’elle appartient exclusivement aux provinces et non à un autre niveau de pouvoir, en l’occurrence le pouvoir central. À juste titre, la province du Katanga avait, dès les débuts de l’application de la Constitution de 2006, fixé un SMIG de 100 dollars américains pour l’ensemble de son territoire. »
Aussi, il n’hésite pas à critiquer la déclaration du ministre du Travail, qui a qualifié cette augmentation du SMIG de cadeau du Chef de l’État. Pour Michel Kumbu, cette affirmation est erronée.
« Nul ne plaide par procureur, et je suis convaincu que le président n’a pas demandé au ministre de s’exprimer de la sorte. Le président a adressé un message à la Nation lors des festivités de fin d’année, mais ce message n’a pas été entendu. Cela me rappelle une leçon de droit des obligations de mes années d’études, à savoir la vente avec condition suspensive », a-t-il renchéri.
De même, Jean Michel Kumbu pense que même le décret de 2018 (un faux parallélisme de forme en raison de la compétence attribuée) qui a révisé le taux du SMIG était fait en violation de la constitution.
Dostin Eugène LUANGE