La RDC s’active sur différents fronts pour répondre aux attaques des rebelles dans l’est. Alors qu’un accord sur les minéraux avec les États-Unis, en échange d’un soutien militaire américain, est sur toutes les lèvres ces derniers jours, Kinshasa ne s’est pas officiellement prononcé.
Deux semaines après les premières mentions dans la presse, on en sait toujours peu sur l’accord sur les minéraux, envisagé entre la RDC et les États-Unis. Alors que les deux capitales restent officiellement silencieuses, leurs représentants s’activeraient pourtant en coulisses pour faire avancer ce dossier ultra-sensible. Samedi 8 mars, le Financial Times a ainsi révélé que les discussions se sont intensifiées entre les deux parties ces derniers jours.
« La RDC est dotée d’une part importante des minéraux critiques nécessaires aux technologies de pointe. Les États-Unis sont ouverts à la discussion de partenariats dans ce secteur qui sont alignés sur l’agenda « America First » de l’administration Trump », déclare un porte-parole du département d’État américain, relayé par le quotidien économique britannique.
Les sources du Financial Times ajoutent que plusieurs obstacles persistent en vue d’un éventuel accord, qui a été proposé pour la première fois par l’Africa-US Business Council. Basé à New York, ce groupe de lobbying déclare agir au nom du sénateur congolais Pierre Kanda Kalambayi. Ce dernier est président de la commission Défense, sécurité et protection des frontières au Sénat, et membre du parti du chef d’État Félix Tshisekedi.
Dans une lettre adressée par l’Africa-US Business Council au secrétaire d’État américain Marco Rubio, il est proposé aux États-Unis un accès « exclusif » aux ressources minières congolaises, estimées à plus de 24 000 milliards de dollars. La RDC, premier fournisseur mondial de cobalt et deuxième producteur mondial de cuivre, ainsi que fournisseur d’étain et de coltan, représente un atout stratégique pour l’industrie américaine de défense et de haute technologie.
Dans une interview accordée au New York Times en février, le président congolais a déjà évoqué un possible intérêt des États-Unis pour les minéraux congolais, sans entrer dans les détails. Sa porte-parole Tina Salama avait alors réagi sur le réseau social X (ex-Twitter), précisant que « Félix Tshisekedi invite plutôt les USA, dont les entreprises s’approvisionnent en matières premières stratégiques auprès du Rwanda qui les pille en massacrant nos populations, à venir directement les acheter chez nous ».
Au nom de la sécurité
Selon la lettre, la RDC offrirait aux États-Unis des droits d’extraction et d’exportation privilégiés ainsi que l’exploitation du port en eaux profondes de Banana par des entreprises américaines. En contrepartie, Washington s’engagerait à former et équiper l’armée congolaise pour sécuriser les routes minières face aux groupes armés, tout en envisageant une présence militaire renforcée. Une rencontre entre les présidents Tshisekedi et Trump est également suggérée pour finaliser l’accord et obtenir un soutien du Congrès.
Si cette initiative peut s’inscrire dans la volonté du président Tshisekedi de diversifier ses partenariats et de réduire l’influence chinoise sur le secteur minier congolais, elle intervient à un moment crucial pour la sécurité de la RDC. Le pays est en effet frappé dans l’est par une coalition de groupes rebelles (M23/AFC), soutenue selon Kinshasa par le régime de Paul Kagame au Rwanda voisin. Les rebelles ont pris le contrôle de plusieurs villes et sites stratégiques, comme un site de coltan qui représenterait 15 à 20 % de la production mondiale.
Des questions sans réponses
Pour le moment, les détails sur l’accord entre les États-Unis et la RDC apportent davantage de questions que de réponses. Par exemple, il est difficile de savoir si l’accord concernera directement le gouvernement américain ou offrira des facilités aux entreprises américaines pour acquérir des projets miniers en RDC.
Dans les deux cas, quels seraient les projets concernés par cet accord, alors que 80 % des mines congolaises sont sous contrôle chinois, selon un officiel congolais ? Par ailleurs, les entreprises américaines n’ont manifesté ces dernières années aucun intérêt notable pour la RDC, surtout depuis la vente par Freeport-McMoRan de sa participation dans la mine de cuivre Tenke Fungurume au chinois CMOC en 2016. Difficile donc de savoir, à l’heure actuelle, les investisseurs américains intéressés par un tel projet.
Sur le volet sécuritaire également, les États-Unis ont certes dénoncé le soutien du Rwanda aux rebelles et pris des sanctions, mais n’ont encore proposé officiellement aucune aide militaire à Kinshasa.
DosEco avec l’agence Ecofin