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Procès Bukanga-Lonzo: Quand l’avocat général révèle une conspiration contre Déogratias Mutombo jamais mise en cause par l’IGF (Enquête)

Plus les années passent, plus les révélations, dans le Procès dit de Bukanga-Lonzo, convainquent les congolais d’une conspiration, si pas d’un acharnement contre l’ancien Gouverneur de la Banque Centrale du Congo, Deogratias Mutombo.

Tenez! Le Procès Bukanga-Lonzo a débuté entre 2020 et 2021, à la suite d’une plainte de l’inspection Générale des Finances (IGF), après son rapport sur ce projet, notamment à la Banque Centrale du Congo. Dans son rapport, l’IGF n’avait mis en cause, que l’ancien Premier Ministre Matata, l’ancien Ministre des Finances Patrice Kitebi et le Sud africainKobler, gestionnaire du Projet. La BCC n’était pas mise en cause du tout. C’est ici que l’on estime que la BCC, en tant qu’exécutant, avait fait correctement son travail.

Pendant ce temps, Déogracias Mutombo, en tant qu’ancien Gouverneur de la BCC, se voyait à des millions des kilomètres de ce dossier. Mais voilà, en juillet 2023, la Cour va extirper Patrice Kitebi du dossier, pour le remplacer par lui, l’ancien Gouverneur de la BCC. C’est le début de l’acharnement.

Nos enquêtes nous conduisent à la cour où Déogracias Mutombo est invité avec l’ancien Ministre des Finances Henri Yav Mulang. Lui, a été auditionné avant l’ancien gouverneur de la Banque Centrale par l’Avocat Général Kasongo Mpau. S’en est suivie l’audition de Déogracias Mutombo mais de manière très expéditive, pour moins de 30 minutes, par ce même avocat général. Dans l’échange, on peut déjà déceler la cabale. L’avocat général demande à Deogracias Mutombo : « Pourquoi la BCC a payé à la Primature des montants destinés au Projet Bukangalonzo ? ». La réponse de Deogracias Mutombo était aussi claire : « la BCC ne paie que suivant les instructions contenues dans les ordres de paiements émis par le seul Ministre des Finances, la BCC ne peut pas payer à un bénéficiaire autre que celui qui est mentionné dans l’ordre de paiement ».

Cette réponse embarrasse l’avocat général qui dévoile la conspiration contre Mutombo en disant : « Pourtant moi (l’avocat général) j’ai des preuves ici ». Déogracias Mutombo lui demande sur le champs de les lui montrer devant ses avocats. L’avocat géneral fait semblant de leschercher dans sa paperasse. Après, il dit : « on va chercher après ». Déogracias Mutombo lui rétorque : « Mr l’avocat général, c’est important de nous montrer ces preuves-là ». Il répond :« on passe à autre chose ». Comment ne pas trouver malhonnête un tel comportement devant des questions aussi importantes de la gouvernance publique ?

Une semaine après, la Cour publie dans les réseaux sociaux comme à ses habitudes, que l’ancien Gouverneur Deogratias Mutombo, est accusé comme auteur ou co-auteur avec Augustin Matata de détournement de 89 000 000 USD alloués au projet Bukangalonzo. Pourtant à son audition avec l’avocat général Kasongo Mpau, aucun document démontrant le détournement ne lui a été présenté, même le fameux montant de 89 000 000 USD n’avait jamais été évoqué et ne figure pas dans le PV de son audition. Ici, la conspiration contre l’ancien gouverneur de la Banque Centrale du Congo prend corps. Jusqu’à ce jour, la Cour est incapable de lui démontrer comment la BCC a mal travaillé dans ce cadre ou comment lui-même Deogracias Mutombo a détourné l’argent de ce projet.

Ce feuilleton confirme la declaration du chef de l’etat Félix Tshisekedi que la justice congolaise est malade. Pour une justice en bonne santé, après que l’IGF n’ait pas mis en cause la BCC, encore moins son ancien gouverneur dans sa plainte, la Cour aurait dû inviter la BCC comme expert pour expliquer comment les différents paiements ont été effectués, et non pas inviter l’ancien Gouverneur, parce qu’il n’était plus à la BCC. Malgré cela, Deogracias Mutombo et ses avocats ont rassemblé tous les ordres de paiements, des lettres ou OPI des ministres PatriceKitebi et HenriYav et les documents de paiement de la BCC, comme des avis de crédit et des messages swifts aux banques. Tout le travail a été correctement accompli par la BCC.

L’acharnement contre Déogracias Mutombo est indéniable. Pourtant, il n’avait aucune relation au par avant avec Martin Kobler et ne l’a vu pour la première fois qu’à la cour constitutionnelle. Quant à ses relations avec l’ancien premier ministre Matata Ponyo, elles sont connues de tous les congolais qu’elles étaient tendues pendant qu’il était gouverneur de la BCC. Son innocence devrait l’emporter sur son accusation sans preuve comme co-auteur de ce que d’aucuns qualifient de détournement dans l’affaire Bukanga-Lonzo.

Quid de la gouvernance à la BCC par rapport aux paiements du Trésor

La gouvernance à la BCC n’est pas aussi simple que peut se l’imaginer. Il y a, au niveau le plus élevé, le Conseil d’Administration dont le Gouverneur est le Président. La Conseil a pour tâche de définir les grandes orientations de la politique monétaire y compris la politique macroprudentielle, et de suivre la mise en œuvre de ces orientations.

Ensuite, en deuxième lieu, il y a l’organe : le Gouverneur (c’est le Directoire), qui est chargé de mettre en œuvre ces orientations. Le Gouverneur assure aussi le fonctionnement quotidien de la Banque. Cet organigramme a été changé par l’équipe dirigeante actuelle de la BCC.
En-dessous du Gouverneur, à part les Commissaires aux Comptes, il y a deux Directions Générales : la DG en charge de l’Administration et Services Techniques, qui supervise les directions du support de la Banque et le DG en charge de la Politique Monétaire et des Opérations Bancaires et de Marchés, qui supervise les directions du cœur de métier de la Banque.

Qui engage des dépenses du Trésor ?

Dans la chaîne de la dépense, il y a quatre phases : l’engagement de la dépense, la liquidation, l’ordonnancement et le paiement. La BCC ne se trouve qu’à la 4ème phase, le paiement. Elle n’est pas en relation ni en coopération directe ni avec la Primature ni avec le ministère du Budget. Les paiements réguliers par OPI sont consécutifs au passage de la dépense par ces 3 premières phases. Dans le cas des dépenses régulières (par OPI) de Bukangalonzo, comme c’est la Primature qui engageait les dépenses, les engagements étaient transmis au Ministère du Budget pour liquidation, ensuite après transmission par le ministère du Budget au ministère des finances (l’Ordonnateur du Gouvernement), ce dernier ordonnance à la BCC pour paiement.

Concernant les dépenses en urgence, qui constituent l’essentiel des paiements pour Bukangalonzo, la phase de la liquidation est by passée. En effet, la Primature engage ces dépenses en les transmettant directement au ministère des finances, qui les ordonnance à la BCC pour paiement.

Quant à savoir s’il y a eu des paiements effectués au profit des bénéficiaires non indiqués sur les titres de paiement du Ministère des Finances,Deogracias Mutombo n’en apas connaissance au regard des pièces de paiement lui transmis officiellement par les services de la BCC. Le Gouverneur ne peut pas instruire la direction des opérations d’effectuer un paiement par débit du compte du Trésor. Le seul Ordonnateur du Gouvernement, c’est le ministre des finances.

Par ailleurs, entre la BCC et les banques commerciales correspondantes, locales comme étrangères, il y a un autre système de paiement appelé « SWIFT ». C’est une messagerie des paiements cryptée, très sécurisée. Ainsi, la plupart des paiements en monnaies étrangères effectués par transfert au bénéfice notamment de la société sudafricaine, Africom, qui gérait Bukangalonzo, dont le compte qui recevait l’argent se trouve être en Afrique du Sud, ont été faits au moyen des messages Swift envoyés par la BCC aux banques commerciales locales, lesquelles ont à leur tour instruit, par messages Swift toujours, leurs correspondants étrangers en dollar (généralement américains). Il s’en suit que toutes les opérations de saisie, vérification et autorisation d’envoi de la messagerie Swift ont été faites séparément par trois agents différents de la direction des Opérations de la BCC, pour raison de sécurisation des opérations.

Lors de son audition, Deogracias Mutombo avait demandé à l’avocat Général qui l’avait interrogé de faire une réquisition à la BCC pour obtenir les copies des messages Swift envoyés aux banques commercialeset une autre réquisition aux banques commerciales, pour obtenir copies des messages Swifts que ces dernières ont envoyés à leurs correspondants étrangers, de manière à voir quels montants ont été réellement payés à Africom. Il va de soi que si le compte d’Africom en Afrique du Sud était en Rand et non en dollar, son banquiert, en l’occurrence la Standard Bank sudafricaine, en recevant ces dollars pour compte Africom, pouvait les racheter, au taux acheteur, généralement inférieur au taux du marché, pour créditer le compte d’Africom en rands qu’elle lui revendait. Africom devrait nous dire pourquoi elle recevait des montants inférieurs par rapport à ceux mentionnés sur les titres de paiement. S’agit-il des différences de change ? Il convient de poser la question à Africom, si son compte n’était pas en dollar. Si Africom recevait les rands au taux acheteur, le rapport des montants reçus qu’elle peut présenter en dollars utilise quel taux de change USD/ZAR ?

En définitive, tous les montants destinés au projetsBukanga-Lonzo ont été correctement payés par la BCC.Puisque qu’il en est ainsi, les juges de la Cour Constitutionnelle devraient avoir leur conscience tranquille en rendant justice à l’ancien gouverneur de la BCC. Depuis 2021, avec notamment le fameux dossier « Congo hold up » et autres, Deogracias Mutombo a été tellement persécuté. Malade, il s’est rendu à l’étranger pour des soins médicaux qu’il poursuit à ce jour.

DosEco.cd avec Infosdirect

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