La 37e session ordinaire du Conseil national du travail s’ouvre ce 21 avril 2025 à Kinshasa, après une semaine de travaux préparatoires entamés le 8 avril, dont aucun détail n’a été communiqué. Parmi les sujets inscrits à l’ordre du jour, figure « l’épineuse question de l’ajustement du Salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) annoncée en début d’année par le gouvernement », selon la formule utilisée par la Fédération des entreprises du Congo (FEC), principale organisation patronale du pays.
Cette session tripartite — réunissant gouvernement, employeurs et représentants des travailleurs — est un passage obligé pour toute réforme du SMIG.
Avant la tenue du Conseil, le président de la République, Félix Antoine Tshisekedi, a exprimé ses attentes lors du Conseil des ministres tenu le 18 avril à Lubumbashi. Il a estimé que « l’augmentation du SMIG devrait, avant tout, bénéficier aux travailleurs les plus vulnérables, dont les revenus actuels ne permettent pas de couvrir les besoins essentiels », rapporte le compte rendu officiel. Selon lui, « cette mesure représenterait un véritable levier de dignité et de justice sociale » pour une catégorie de travailleurs exposée « le plus durement aux effets de la précarité ».
Pour concrétiser cette orientation, il faudrait revoir en profondeur le décret du Premier ministre du 22 mai 2018, qui encadre actuellement le SMIG. Ce texte définit sept grandes catégories de travailleurs — du manœuvre au cadre de collaboration — chacune disposant de son propre salaire minimum. Le montant varie aussi selon les échelons et les classes. Ce système repose sur un mécanisme appelé « tension salariale », un coefficient qui permet de déterminer les SMIG des catégories supérieures à partir de celui du manœuvre ordinaire. Ce principe rend techniquement difficile toute revalorisation ciblée.
Une hausse ciblée, favorable au patronat
L’arrêté du ministre de l’Emploi et du Travail du 31 décembre 2024, qui avait porté le SMIG du manœuvre ordinaire de 7 075 à 14 500 francs congolais (soit de 2,5 à environ 5 dollars par jour), avait justement été critiqué pour avoir ignoré ce mécanisme. Face à la pression du patronat, la Première ministre Judith Suminwa Tuluka avait demandé au ministre Éphraïm Akwakwa Nametu de rapporter l’arrêté, qui devait entrer en vigueur en février 2025.
Dans le fond, la recommandation présidentielle pourrait satisfaire les employeurs. En limitant la revalorisation aux catégories les plus vulnérables, l’impact sur les charges salariales des entreprises resterait contenu. Un argument de poids, surtout dans un contexte économique fragilisé par l’insécurité persistante dans l’est du pays.
Dans ce contexte, le SMIG pourrait difficilement augmenter pour redonner suffisamment du pouvoir d’achat aux « travailleurs les plus vulnérables ». À Kinshasa, selon plusieurs sites spécialisés, une famille de quatre personnes aurait besoin d’environ 3 000 dollars par mois pour vivre décemment — logement, transport, soins et éducation inclus. Or, même doublé, le SMIG d’un manœuvre ordinaire ne permettrait pas d’atteindre 200 dollars mensuels, même en travaillant tous les jours.
Par ailleurs, une hausse du SMIG, même ciblée, pourrait avoir des effets pervers sur l’économie. L’augmentation des revenus risque de stimuler la demande, dans un contexte de production locale limitée. Cela pourrait faire grimper les prix sur les marchés, alimentant l’inflation. Une telle dynamique compromettrait les efforts du gouvernement pour stabiliser les prix des produits de première nécessité, un objectif central dans la lutte pour le pouvoir d’achat.