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Affaire Centre financier et Kinshasa Arena : Comment l’action du chef de l’Etat a été sapée par l’IGF (Enquête)

Après la formation du gouvernement Sama Lukonde, Nicolas Kazadi décide de créer un pôle financier dynamique et un nouveau lieu de vie pour les Kinois, qui offrirait des espaces de restauration, des centres de conférences, des parkings, des bureaux et un data center de premier plan. Il s’agit de construire un centre financier qui engloberait également un Centre de Congrès pouvant accueillir jusqu’à 3000 personnes, un hôtel Marriott – du nec plus ultra de l’hôtellerie mondiale, Marriott International, dont le siège se trouve à Bethesda, dans le Maryland aux USA – de 240 chambres. L’objectif est de mettre en place un soft power – stratégie d’influence qui se traduit par la capacité d’un État à influencer et à orienter les relations internationales en sa faveur.

Troisième partie : dossiers Centre financier et Kin Arena

Au-delà de l’aspect infrastructurel, le Centre financier de Kinshasa ambitionne donc de renforcer la crédibilité économique du pays en étant le reflet des progrès économiques du pays et en attirant les investisseurs, les hommes d’affaires et les événements d’envergure internationale, plaçant ainsi la RDC au cœur des activités sur le continent. Des campagnes médiatiques malveillantes ont pourtant été menées pour saboter ce projet, sans raison, oubliant que le principal concurrent en la matière dans la région n’est autre que le Rwanda, avec son Kigali Convention Center. Pourtant, de tous les dossiers qui sont souvent reprochés à Nicolas Kazadi, c’est le seul qui a été initié par l’ancien ministre des Finances.

Le marché de construction du Centre financier de Kinshasa est confié à la société turque Milvest. Nicolas Kazadi recrute la société française Gemo Management, spécialisée dans la prise en charge des projets d’envergure dans les grandes opérations d’architecture et d’urbanisme au niveau international, pour en assurer le contrôle. Mais Nicolas Kazadi fait systématiquement l’objet d’attaques de ses adversaires. Or, dans ce cas précis, nul ne peut parler de surfacturation car il a négocié un prix particulièrement compétitif de 1.800 USD le mètre carré. A titre de comparaison, la Tour-F, futur immeuble le plus géant d’Afrique noire en construction à Abidjan en Côte d’ivoire, affiche un coût au mètre carré de 3.500 USD, soit le double du centre financier de Kinshasa.

Accusation fausse de toutes pièces

Donc, il va falloir trouver autre chose. Eureka : c’est à propos du financement que l’Inspection générale des Finances déclenche la polémique. Devant le chef de l’Etat, Jules Alingete accuse Milvest de n’avoir pas préfinancé la construction du projet comme convenu dans le contrat, mais d’avoir plutôt travaillé avec l’argent payé par le gouvernement. Et comme d’habitude, l’inspecteur général des finances-chef de service prend soin de faire relayer dans la presse toutes ces accusations, même non fondées, et le ministre des Finances et l’entreprise turque sont salis à foison.

Pourtant, l’engagement contractuel était que Milvest devait recevoir 15% du montant total au démarrage, ensuite il recevrait un montant mensuel moyen qui serait ajusté en fonction des factures mensuelles. Le contrat n’a jamais prévu un quelconque préfinancement.
«Si on avait suivi les clauses du contrat, ces bâtiments auraient pris 3 à 4 ans pour être achevé», nous déclare un proche du dossier. Qui poursuit : «le prestataire s’était engagé auprès du président turc Recep Tayip Erdogan de préfinancer le projet et de le terminer coûte que coûte avant décembre 2023».

Milvest a ainsi préfinancé les travaux, car peu avant l’inauguration des premiers bâtiments intervenue en décembre 2023, le constructeur avait déjà avancé près de 200 millions de dollars de travaux dont l’Etat ne s’était pas acquitté. Les paiements interviendront par la suite, notamment grâce à un emprunt extérieur de 130 millions dollars obtenu par la RDC. Ce préfinancement s’est fait grâce à crédit fournisseur obtenu par le constructeur. A part le ciment, tous les matériels de construction était d’ailleurs commandé de l’étranger. Donc l’accusation de Jules Alingete est fausse de toutes pièces.

Le Centre financier est inauguré dans les délais, en décembre 2023, en pleine campagne électorale. Jusqu’au bout, Nicolas Kazadi a veillé au grain. A titre d’exemple, l’Office de voirie et drainage exigeait 29 millions de dollars pour la construction autour du centre financier et les travaux d’évacuation des eaux vers le fleuve. Il obtiendra les mêmes travaux chez Milvest pour 13 millions USD.

Pure invention et manipulation

Malgré des campagnes de presse malveillantes qui ont alimenté les réseaux sociaux en ragots de tous genres, l’IGF finit par publier un communiqué dans lequel elle déclare : «L’IGF informe l’opinion nationale qu’elle n’a jamais ouvert un dossier relatif au Centre financier de Kinshasa. A ce jour, ce projet se déroule sans problème. Tout ce qui se dit dans les réseaux sociaux relève de la pure invention et de la manipulation politique».

Dernier dossier de notre enquête : la construction à Kinshasa d’une arène – grande plateforme destinée aux événements sportifs et spectacles musicaux. Il s’agit d’un projet qui tient à cœur Félix Tshisekedi depuis son premier mandat. Le chef de l’Etat tenait à offrir à la jeunesse congolaise un haut lieu du sport et de la culture. Comme si l’objectif était d’entraver la réalisation de l’action du chef de l’Etat congolais, une main noire s’est attelée à en entraver la construction et en retarder les travaux. Dans ce rôle macabre, l’Inspecteur général des finances-chef de service Jules Alingete, qui a même parlé à travers ses communicants de surfacturation.

A la suite du premier voyage du chef de l’Etat en Turquie en septembre 2021, son conseiller spécial en charge des infrastructures conduit une équipe multisectorielle comprenant des conseillers de plusieurs ministères à Istanbul en avril 2022 pour discuter avec l’entreprise turque
Summa, qui a construit Arena Dakar au Sénégal et la BK Arena de Kigali au Rwanda. Dans la capitale turque, les deux parties signent un procès-verbal qui conclut que Summa devra construire une arène de
20.000 places à 125 millions de dollars US.

Le 7 juillet 2022, c’est à Kinshasa que le Premier ministre Jean Michel Sama Lukonde préside la cérémonie de signature de construction de l’Arena de Kinshasa par le ministre des Infrastructures Alexis Gisaro et M. Semira Bora, président la société Summa, en présence de plusieurs ministres sectoriels, dont celui des Finances Nicolas Kazadi et celui des Sports Serge Tchembo Nkonde. Le lendemain 8 juillet, le conseiller financier de Nicolas Kazadi, M. Vagheni Pay Pay, fait remarquer au ministre que le contrat signé la veille portait sur la construction de l’Arena de Kinshasa à 175 millions de dollars US, alors que le montant convenu à Istanbul était plutôt de 125 millions de dollars américains. Entre les deux, il y a une différence de 50 millions en devise américaine.

Kazadi empêche une ‘‘frappe’’ de 50 millions

Piqué au vif, le ministre des Finances écrit un message au chef de l’Etat pour lui expliquer la situation. Ce dernier prend un coup de sang et exige qu’on revoie vite cette situation conformément à ce qui a été convenu dans la capitale turque. Suite à cette instruction, le contrat signé sera revu au montant de 125 millions de dollars. Nicolas Kazadi a sauvé une grosse somme d’argent en faveur du pays, mais on imagine la colère contre lui de la part de tous ceux qui comptaient sur cette ‘‘frappe’’ de 50 millions USD pour s’en mettre plein les poches. Le ministre des Finances devient un homme à abattre, reste à trouver une occasion.

Mais un jour, au cours d’une discussion à laquelle participe M. Thuran Mildon, patron d’une autre entreprise turque, Milvest, Félix Tshisekedi demande à ce dernier combien peut coûter la construction d’une arène sportive. Après plusieurs hésitations de la part de M. Mildon qui ne voulait pas entrer en confrontation avec ses compatriotes de Summa et plusieurs insistances du chef de l’Etat, le PDG de Milvest finit par dire qu’il pourrait la construire à 110 millions au maximum. Sur le champ, le président Tshisekedi ordonne à Nicolas Kazadi de traiter le dossier afin de confier le marché à Milvest, et d’écrire à Summa pour rompre le contrat. L’argentier national s’exécute. Quelques jours plus tard, Milvest présente son devis officiel pour la construction de Kinshasa Arena à près de 104 millions de dollars. L’affaire est dans le bon.

Encore une fois, le prix est imbattable. En effet, le Rwanda a construit son BK Arena de 10.000 places à 104 millions USD ; le Sénégal son Dakar Arena de 15.000 à 117 millions USD ; et la Tanzanie vient de signer un contrat pour la construction d’une arène semblable à 172 millions USD. Dès lors, réussir le pari d’une arène de 20.000 USD à 104 millions USD est une vraie prouesse.

Travaux bloqués pour rien

L’entreprise turque reçoit un acompte de 20 millions de dollars, mais elle accélère, y compris avec ses moyens. En effet, Milvest a préfinancé des travaux pour plus de 65 millions USD sur les 104 millions USD du coût total du projet. La société exige alors d’être payée en fonction de son préfinancement vu qu’elle est en avance sur les travaux effectués. Nicolas Kazadi va fournir un effort pour lui payer 45 millions de dollars, et d’apurer le reste au fur et à mesure de l’avancement du projet. Mais Nicolas Kazadi quitte le ministère des Finances et son instruction est immédiatement bloquée par l’IGF et par son successeur.

Comme s’il se destinait à bloquer tous les projets qui rentrent dans le programme du chef de l’Etat, c’est le moment que choisit l’IGF d’entrer en action en bloquant 1.300 containers de matériel commandés par Milvest pour Kinshasa Arena. Les travaux s’arrêtent donc. Ils resteront à l’arrêt pendant plusieurs mois sans raison, occasionnant d’énormes pertes au constructeur du fait du maintien des charges fixes du projet sans activités. Le 15 décembre 2024, sans explication, le nouveau ministre des Finances Doudou Fwamba, le ministre d’Etat en charge de l’Aménagement du territoire Guy Loando, et l’IGF-chef de service Jules Alingete s’en vont inspecter le chantier de Kinshasa Arena dont ils annoncent la reprise les travaux et le déblocage des 1.300 containers qui étaient bloqués par l’IGF à Matadi.

Comme dans d’autres dossiers – forages, lampadaires, centre financier– rien n’a été trouvé pour incriminer Nicolas Kazadi. «Aucune anomalie n’a été relevée, l’IGF a donc bloqué les travaux pour rien», se désole un journaliste de la place. Mais nul n’a eu le courage de disculper publiquement l’ancien ministre des Finances, qui a été victime de plusieurs campagnes de lynchage médiatique.

En conclusion de cette enquête, nous nous sommes posé la question de savoir pourquoi l’IGF-chef de service Jules Alingete entrave de manière quasi-obsessionnelle et systématique la réalisation du programme du chef de l’Etat. C’est le cas également de la délivrance de la carte d’identité aux Congolais, qui était une promesse ferme de Félix Tshisekedi dans un pays où nul recensement n’a été effectué depuis 1984, et où nul ne peut dire avec exactitude qui est congolais et qui ne l’est pas. Une question extrêmement importante qu’utilisent les ennemis pour agresser le pays.

C’était donc une priorité absolue du président Tshisekedi de régler ce problème. En 2023, un contrat de type partenariat public privé de 697 millions de dollars avait été signé par le gouvernement, représenté par l’Office national d’identification de la population, ONIP, avec le consortium Idemia/Afritech. Symboliquement, la première carte d’identité est offerte au chef de l’Etat lui-même. Après le déploiement du matériel et plusieurs tests, le 26 avril 2024, l’ONIP commence la délivrance des cartes d’identité. Mais quelques jours plus tard, l’IGF bloque à son tour le processus du contrat IDEMIA/AFRITECH, qu’il accuse d’être entaché de «nombreuses irrégularités» et d’être «surfacturé».

Pourtant, le Cameroun, un pays de seulement 28 millions d’habitants, a signé un contrat de 226 millions de dollars avec l’entreprise allemande Augencic pour une opération similaire. Rapporté à un pays de 120 millions d’habitants comme la RDC, le contrat IDEMIA/AFRITECH semble même moins élevé. Dans tous les cas, l’opération de délivrance de la carte d’identité a été ainsi torpillée elle aussi et, à ce jour, les Congolais n’ont toujours pas de pièces d’identité.

Belhar MBUYI (Finance-cd.com) et Olivier KAFORO (Chronik’ Eco)

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