Après analyse du partenariat stratégique en gestation sur les minerais que compte signer la République démocratique du Congo avec les États-Unis d’Amérique, l’Observatoire de la dépense publique (ODEP), dirigé par le professeur Florimond Muteba Tshitenge, exhorte le président Félix Tshisekedi à réorienter le pilotage de ce partenariat vers la Primature.
Cet expert en élaboration et conception de projets n’avalise pas le pilotage de ce partenariat par la Présidence de la République. Dans son communiqué publié mardi 17 juin- dont une copie est parvenue à DosEco, Florimond Muteba Tshitenge explique que la décision de loger la cellule de suivi du partenariat RDC–USA à la Présidence de la République constitue une entorse aux principes de bonne gouvernance administrative. D’où, estime-t-il, la nécessité, pour le président de la République de recomposer la coordination sur la base de compétences avérées et représentatives.
“L’ODEP exprime de sérieuses réserves quant à la gouvernance actuellement mise en place autour de ce processus stratégique, qui engage directement la souveraineté économique de la République. La décision de loger la cellule de suivi du partenariat RDC–USA à la Présidence de la République constitue, selon nous, une entorse aux principes de bonne gouvernance administrative. Un tel dispositif, relevant d’un enjeu diplomatique et économique majeur, aurait dû être institutionnellement rattaché à la Primature, conformément à l’article 91 de la Constitution de la République démocratique du Congo, qui dispose que : « Le Gouvernement détermine, en concertation avec le Président de la République, la politique de la Nation et en assume la responsabilité »”, lit-on dans son communiqué.
Procédures opaques et favoritisme
En sus du positionnement institutionnel, l’ODEP critique également la nature des nominations au sein de cette cellule stratégique. Selon elle, les choix opérés sont teintés de favoritisme et marqués par l’opacité, avec une prédominance de profils issus des cercles proches de la Présidence. Cette organisation pointe un « cumul de fonctions » et une « absence de procédure compétitive ».
En réponse, l’ODEP recommande un appel public à candidatures. Pour piloter efficacement un projet d’une telle envergure, il préconise des profils aguerris : hauts fonctionnaires des ministères concernés, professeurs d’université disposant d’au moins vingt ans d’expérience, ainsi que cadres issus du secteur minier.
Transparence et cadrage exigés
Dans la foulée, l’ODEP a plaidé également pour la publication d’un document de cadrage, précisant les objectifs du partenariat, les mécanismes de suivi, les modalités de transparence, ainsi que les engagements financiers. Une note de synthèse, annexée à la lettre adressée à la Présidence, propose un schéma d’analyse de projets publics destiné à mieux encadrer les investissements.
« La RDC ne peut plus se permettre de confier la gestion de ses ressources critiques à des dispositifs institutionnels opaques ou à des arrangements échappant aux exigences de redevabilité », insiste-t-il. Ce développement, ajoute l’ODEP, ne pourra porter ses fruits que s’il est porté par une population informée et impliquée.
Washington réclame des précisions
Depuis avril, les négociations se poursuivent entre les gouvernements congolais et américain. Ce partenariat, censé renforcer la coopération bilatérale dans le domaine minier, s’inscrit dans une perspective de développement et de stabilité économique. Il prévoit, selon plusieurs sources, que Kinshasa facilite l’accès aux minerais critiques en échange d’un appui à la paix dans l’Est du pays.
Mais à Washington, cinq membres du Congrès ont récemment demandé des éclaircissements sur les contours et les garanties du projet, témoignant d’un intérêt grandissant – et d’une certaine méfiance – autour de ce dossier stratégique.
Dostin Eugène LUANGE