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RDC: la pression fiscale freine l’expansion numérique, selon la GSMA

En République démocratique du Congo (RDC), le secteur des télécommunications mobiles joue un rôle central dans la connectivité des populations et la numérisation de l’économie. Pourtant, ce secteur stratégique fait face à une pression fiscale jugée disproportionnée, déplore l’Association mondiale des opérateurs de téléphonie mobile (GSMA). Une vingtaine de taxes sont imposées au secteur des télécoms mobiles, une situation qui compromet les perspectives d’investissement dans le secteur, fragilise sa rentabilité et freine l’extension des services numériques à grande échelle, selon l’organisation.

Dans son étude pays « Mobile Sector Taxation : Comparative Fiscal Burden in DRC Digital Infrastructure Policy Brief », datée de juin 2025, la GSMA indique que le taux effectif moyen d’imposition (TEMI) sur le bénéfice avant impôts atteint 91 % pour le secteur mobile, contre 71 % pour le secteur minier, pourtant dominant en RDC, et 34 % pour la finance de détail. Ce déséquilibre découle d’un régime fiscal jugé inadapté, car largement fondé sur des taxes assises sur le chiffre d’affaires plutôt que sur les bénéfices réels des entreprises.

La GSMA explique que les informations fiscales, les estimations du taux effectif moyen d’imposition et l’analyse de l’assiette fiscale sur lesquelles se basent ses chiffres lui ont été fournies par Ernst and Young LLP, sur la base des informations disponibles en 2024 et l’analyse du TEMI a été préparée spécifiquement pour GSMA.

« Seulement 8 % de la charge fiscale du secteur de la téléphonie mobile est basée sur les bénéfices, la plupart des taxes provenant des recettes et d’autres sources fixes. En revanche, les impôts sur les bénéfices représentent 35 % de la charge fiscale du secteur minier et 54 % pour la finance de détail. Il est à noter que le secteur de la finance de détail n’est pas confronté à des taxes sectorielles significatives, la plupart de ses obligations fiscales provenant de l’impôt sur le revenu des sociétés et des contributions liées à la main-d’œuvre », souligne l’organisation de défense des intérêts des sociétés télécoms.

Effets négatifs

L’un des effets directs de cette fiscalité, selon la GSMA, est une baisse de la capacité opérationnelle des entreprises. La pression fiscale identifiée réduit considérablement la capacité des opérateurs à investir dans l’extension et la modernisation des réseaux, notamment en zones rurales et enclavées. Les projets d’infrastructure critiques, comme la couverture 4G et l’arrivée future de la 5G, deviennent plus risqués et moins prioritaires dans ce contexte. Les droits d’accise appliqués aux services mobiles renchérissent les coûts pour les consommateurs finaux et restreignent l’accessibilité aux services numériques, réduisant l’adoption d’Internet mobile et limitant le potentiel de la transformation digitale dans des secteurs clés comme l’éducation, la santé, l’agriculture ou le commerce.

Dans un précédent rapport de 2023, « Mobile Tax Policy and Digital Development : A study of markets in Sub-Saharan Africa », la GSMA soutenait déjà que « l’impact économique positif de la suppression des taxes sectorielles a été démontré par plusieurs études. Par exemple, la Banque mondiale a estimé que la suppression de ces taxes en RDC augmenterait la couverture rurale 3G et 4G de plus de trois points de pourcentage, touchant près de 1,5 million de personnes. Cela pourrait également accroître l’adoption du mobile et de l’internet mobile de 7,4 et 6,4 points de pourcentage, respectivement ».

Pour l’association, la fiscalité excessive du secteur des télécoms mobiles est discutable au regard des caractéristiques fondamentales qu’il partage avec les industries minière et financière mieux loties que lui : des investissements initiaux importants, l’utilisation de ressources publiques limitées comme le spectre radioélectrique, et des marges comparables.

Lobbying ?

Le rapport de la GSMA, qui plaide en faveur d’un allègement de la fiscalité dans le secteur des télécommunications mobiles en République démocratique du Congo (RDC), s’inscrit dans un contexte économique et politique particulièrement délicat. En effet, la question de la taxation des télécoms a suscité des débats au sein des institutions congolaises, notamment au Parlement et dans les sphères gouvernementales, ces cinq dernières années. Les autorités congolaises qui considèrent ce secteur comme sous-taxé par rapport à son potentiel économique envisagent toujours d’en tirer des ressources supplémentaires.

Sous pression face à des besoins budgétaires croissants — notamment pour financer les infrastructures, les services sociaux et la sécurité — l’exécutif cherche en effet à élargir sa base fiscale, et les télécoms mobiles apparaissent aux côtés d’autres secteurs comme des contributeurs naturels. Dans ce climat, certains responsables politiques ont parfois ouvertement exprimé leurs doutes quant à la réelle contribution fiscale des grandes entreprises du secteur, souvent des multinationales.

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