La signature de l’accord entre la République Démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda, sous la médiation des États-Unis d’Amérique, marque indéniablement un tournant dans les relations, non seulement entre les pays de la région des Grands Lacs, mais aussi entre l’Afrique et l’Amérique. Nous allons examiner ce qui, selon nous, vient de changer de manière significative.
Pour l’instant, en analysant le processus qui a conduit à cet accord historique, et au regard des préoccupations et interrogations soulevées dans l’opinion publique, je souhaite apporter quelques éléments susceptibles d’éclairer la lanterne de nos compatriotes.
1. Contexte Justifiant l’Action Diplomatique
Cela fait bientôt 30 ans que le Congo est plongé dans l’abîme de la guerre. Depuis 1995, les populations de l’est de notre pays subissent une tragédie sécuritaire et humanitaire en raison de la guerre d’agression dont la République Démocratique du Congo est victime de la part du Rwanda. Cette guerre a des visées économiques et expansionnistes. Elle repose sur un pillage organisé des ressources minières de la RDC et entraîne des déplacements de populations autochtones, ainsi que des vagues d’immigration constatées depuis plus d’une décennie par diverses sources, y compris des églises et des ONG.
N’a-t-on pas entendu certains appeler à la révision des frontières héritées de la colonisation ? Les partisans de ces revendications ne s’en cachent plus. Le caractère systématique et chronique de cette insécurité a fini par faire de la paix une chimère pour beaucoup de nos compatriotes. Cette attitude est compréhensible, compte tenu de la longue tragédie qui accable ces populations.
Le scepticisme de certains compatriotes à l’égard de cet accord est en partie le résultat de tous ces rendez-vous manqués en faveur d’une paix durable. Mais, sans verser dans un optimisme naïf, posons-nous la question : si l’accord de paix signé à Washington dessert la RDC, pourquoi observe-t-on de l’agitation dans le camp des « favorisés » et de la sérénité dans celui des « défavorisés » ?
L’Accord de Washington, qui est un accord de paix entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda, est le fruit d’une stratégie minutieusement élaborée sur plusieurs années. Dès son accession à la présidence, Félix Antoine Tshisekedi a clairement exprimé sa volonté d’accroître la présence de la RDC dans les instances internationales. La reprise de la guerre dans l’Est a renforcé cette démarche.
2. Pertinence de l’Accord de Washington
Malgré le soutien de la communauté internationale, tous les efforts pour pacifier notre pays semblent avoir échoué. Chaque avancée est souvent suivie d’une intervention du Rwanda, perturbant ainsi la paix. Les actions de Kigali sont dénoncées par les Nations Unies depuis 2009 à travers des résolutions du Conseil de sécurité. À chaque fois qu’il est acculé, Kagame change de stratégie et d’agents.
La résolution 2773 du Conseil de sécurité « condamne fermement l’offensive menée par le M23 » et constitue une victoire diplomatique pour la RDC. Le Conseil demande au M23 de cesser les hostilités et de se retirer des zones contrôlées. À l’égard du Rwanda, il exige également un retrait immédiat de son territoire.
La résolution précise que le Conseil engage la RDC et le Rwanda à reprendre d’urgence les pourparlers diplomatiques afin de parvenir à un règlement pacifique du conflit. L’Accord de Washington s’inscrit dans cette logique et engage la responsabilité américaine en tant que garante du processus. C’est une étape cruciale pour parvenir à la paix.
Cet accord stipule que les États-Unis, en collaboration avec l’Union Africaine et le Qatar, veilleront à la bonne exécution des engagements par le Rwanda et la RDC. Il est essentiel que les États-Unis maintiennent leur crédibilité dans ce processus, surtout que cette paix est un préalable pour envisager toute coopération économique future.
L’accord est clair : les parties conviennent de lancer, dans les trois mois suivant sa signature, un cadre d’intégration économique régionale. Cet accord de paix, entre deux États souverains, retire tout prétexte à Kigali, qui prétendait ne pas être impliqué dans la guerre au Congo.
Les 90 premiers jours suivant la signature de l’accord seront consacrés à la mise en œuvre des engagements sécuritaires, y compris le retrait des troupes étrangères et le désarmement des groupes armés. Le retrait du Rwanda doit être conforme à un plan pré-approuvé.
Conclusion
Cet Accord de Washington offre une opportunité de démanteler le prétexte rwandais, en neutralisant les FDLR et en permettant le retrait des troupes rwandaises du territoire congolais. Il est légitime que certains ressentent de la peur, tandis que d’autres se laissent gagner par la résignation. Cependant, pour l’intérêt supérieur de l’État, rien ne devrait faire reculer le peuple congolais face à ce défi crucial.
L’heure est à l’unité pour notre patrie, face à des ennemis tant internes qu’externes. Rien n’est impossible pour un peuple uni et déterminé à conquérir son destin. La RDC vient d’affirmer, de manière solennelle, son opposition à l’activisme du régime de Kigali et à ses ambitions hégémoniques.
À présent, nos yeux se tournent vers Doha, où se tiennent les pourparlers avec le M23, afin d’assurer la pleine mise en œuvre de l’accord. La prochaine étape est la réalisation effective des engagements formulés à l’ONU et confirmés bilatéralement, pour que le gouvernement de la RDC exerce son autorité sur l’ensemble du territoire national.
Quoi qu’il en soit, malgré les épreuves actuelles, la République Démocratique du Congo est grande et exige de ses fils et filles la grandeur. Ne dit-on pas qu’à grande destinée correspondent de grands défis ? Restons déterminés et unis pour défendre notre mère patrie ! L’avenir du Congo est prometteur, et son histoire s’écrira par des Congolais, comme l’a dit Patrice-Emery Lumumba.
Tina Salama, Porte-parole du Président de la République