L’Observatoire de la dépense publique (ODEP) que dirige le professeur Florimond Muteba Tshitenge demande, une fois de plus, au président de la République Félix Tshisekedi de convoquer les Etats généraux de l’enseignement en République démocratique du Congo.
Dans une étude publiée lundi 20 octobre, cette organisation de la société civile explique que le système éducatif actuel fut conçu avant tout comme utilitaire, visant à produire des travailleurs dociles et productifs au service du colon.
Plus de soixante ans après l’indépendance, le constat dressé par l’ODEP est sévère : absence d’un projet national d’éducation, croissance démographique mal maîtrisée, infrastructures délabrées, manque chronique de ressources et baisse généralisée du niveau de l’enseignement. À cela s’ajoutent, la démotivation du personnel enseignant et la précarité de ses conditions de travail.
Pour l’ODEP, mettre fin à la crise du secteur suppose avant tout de redéfinir le rôle de l’école dans la société congolaise. Cette organisation estime que le système éducatif actuel repose sur une logique d’ascension sociale, où le diplôme est perçu comme la seule voie de réussite, sans véritable lien avec les besoins économiques du pays.
Cette conception, poursuit l’étude, a entretenu « l’illusion que le développement économique découle automatiquement du développement de l’enseignement ». Or, la structure extravertie de l’économie congolaise, centrée sur l’exportation de matières premières, a limité la création d’une classe économique nationale capable de soutenir durablement l’école.
L’ODEP plaide ainsi pour une éducation tournée vers le développement endogène, capable de former des citoyens autonomes politiquement, économiquement et culturellement. L’école, selon l’organisation, doit devenir un outil d’émancipation et non de reproduction des inégalités héritées du passé.
Dans cette perspective, l’ODEP propose une réforme complète des structures éducatives : refonte des programmes, amélioration de la formation des enseignants, adaptation des méthodes pédagogiques et modernisation du matériel didactique. L’État, ajoute-t-elle, doit jouer un rôle central en garantissant la laïcité, la décentralisation effective et des conditions d’apprentissage dignes pour les enfants.
L’organisation recommande aussi de replacer l’enseignement primaire au cœur des priorités nationales. Il ne s’agit pas seulement, souligne-t-elle, d’accroître le nombre d’enfants scolarisés, mais de garantir un apprentissage de qualité et une éducation inclusive, notamment pour les filles, encore trop souvent exclues du système scolaire.
Par ailleurs, l’ODEP insiste sur la nécessité de repenser l’enseignement secondaire et supérieur afin qu’ils cessent de produire des diplômés sans débouchés. Les filières de formation devraient être alignées sur les besoins réels du marché du travail, tandis que la recherche scientifique et technologique doit devenir un levier de développement national.
L’étude conclut que la tenue des États généraux de l’enseignement constituera « un tournant historique » pour refonder le système éducatif congolais. Une telle initiative, selon l’ODEP, permettrait d’établir un consensus national autour d’un projet éducatif cohérent, fondé sur la qualité, l’équité et l’innovation, au service du développement durable du pays.
Célestin KAZADI